Pour celui qui s'intéresse un peu à la généalogie on sait que le faussaire, dans le domaine de la fabrication de fausses pièces historiques, y faisait recette dans des périodes où faire preuve de noblesse était synonyme d'ascension sociale, de meilleure situation. Que dire de nos jours de toutes ces généalogies publiées, aussi fausses que ce que peut l'être une Rolex vendue 10 euros sur un site internet ? Si la motivation est toujours l'ascension sociale et la reconnaissance d'une noblesse ou bien le "cousinage" avec une quelconque vedette de la nébuleuse médiatique qui nous est assenée chaque jour, le cercle de ces reconnaissances a quand même tendance à se resserrer fortement autour des quelques amis facebook du susdit faussaire !
Mises à part ces quelques considérations, se rapportant plus à la psychanalyse qu'à une simple discussion ou assertion, je ne vois qu'une seule explication : l'erreur. Mais combien ces erreurs sont nombreuses et combien nos nouveaux systèmes de communication les colportent facilement et rapidement, en faisant des vérités qu'il sera extrêmement difficile de dénoncer. J'ai évoqué bien des fois ici même ces sites web, ces forums de discussion ou ces facebookeries, regroupant certes des bonnes volontés, mais colportant à tour de bras des inepties, des bondieuseries, comme disait ma pauvre grand-mère, propres à faire d'une généalogie un tissu de mensonges, d'erreurs de dates, de familles décomposées.
Comment alors se répérer dans cet immense fatras, comment réagir quotidiennement, à chaque heure, à chaque instant ? Il faudrait dorénavant des vies pour aller corriger tout cela. Surtout lorsque l'on sait que, comme je l'ai déjà pratiqué et certains autres collègues aussi, une bonne proportion des personnes incriminées, que l'on informe de leurs erreurs, se refusent à répondre et ne font jamais les corrections ; quand on n'est pas tout simplement prié de se mêler de ses affaires !
Nos réseaux de communication ont cette force que tout le monde peut s'y exprimer, même moi ... Hélas, tous les sujets ne sont pas abordables par tout le monde (promis je ne vous parlerai jamais d'automobile, de football ou d'aquariophilie ...), mais tout le monde ne le sait pas.
Et dans le domaine de la généalogie, c'est d'autant plus vrai que ce qui touche la famille est abordable par tous, puisque tous sont concernés à un moment ou à un autre. Mais la famille, ce n'est pas toujours la généalogie, et les bêtises colportées entre petits cousins et neveux ne font souvent pas le poids face à une simple recherche généalogique. Mais ces bêtises, ces affirmations gratuites quant à la situation d'un ancêtre vont apparaître lorsque, peu ou mal informée des choses généalogiques, la tata Marcelle va se mettre à "faire" la généalogie de la famille et à placer un peu partout des pseudos mères biologiques, des amants passagers, des princes Russes et des morts par assassinats, confondant les mois de septembre et de juillet, faisant naître son arrière grand mère trois ans après la naissance de sa fille ... Et mal en prend aux proches familiaux lorsqu'ils livrent une tablette à la tata Marcelle qui pourra ainsi facilement compléter le travail laborieusement (!) accompli.
J'ose à peine vous parler du massacre en perspective ! Car il s'agit bien d'un massacre, un généalogicide à l'échelle mondiale. Méfiez-vous donc des tantes Marcelle sur Internet, reconnaissables à leur écriture hâchée et souvent en majuscule, posant une question sur l'Ardèche au milieu d'une conversation sur les descendants de Guillaume (le Normand ...), vous affirmant, sans référence à aucune source, que l'oncle de la grand-mère à Joseph DESPONT était le fils de Jean Jacques parce que sa mère connaissait la fille du même oncle qui habitait la maison à côté de l'étang où elle avait acheté [...] J'exagère à peine !
Je suis donc sans pitié avec ce genre de personnes, les sites web et les réseaux sociaux les cautionnant.
Sans pitié parce que l'ignorance n'est pas une excuse, pas plus que la bonne volonté, dans des domaines où une certaine éthique, des ensembles de règles et de connaissances sont indispensables pour arriver à ses fins.
Sans pitié parce qu'il existe un grand nombre de solutions pour se former, pour apprendre, pour connaître les bons usages et les bonnes règles. Associations, écoles et universités, généalogistes voire même tutoriaux en ligne, lorsqu'ils sont connus et reconnus, certifiés, permettent de se former, de comprendre comment se construit une généalogie, comment trouver les documents, les sources, que présenter et dire.
Je commence ainsi toujours mes présentations de la généalogie : m'adressant à un ensemble de personnes comme si elles venaient toutes de débuter et précisant pour certains, re-précisant pour d'autres des fondamentaux qu'il est bon d'évoquer le plus souvent possible (voir mon article "La généalogie c'est compliqué", entre autres). Il n'y a guère de solutions à cette saturation de fausses généalogies qu'informer régulièrement, montrer les erreurs, conseiller aux amateurs, avant de se jeter à l'eau, d'apprendre à nager et de ne faire confiance qu'à des gens, des organismes pratiquant le contrôle et la présentation des sources, ainsi que la vérification des données. Pour le reste, cela ne doit être qu'une information à vérifier mais en aucun cas à diffuser, conseiller ou retransmettre.
La généalogie est une affaire sérieuse, compliquée, difficile, tout le reste provient de la discussion de comptoir, du repas de fin de famille, des envies du moment de tata Marcelle. N'admettez pas plus d'attribuer au père de votre arrière-arrière-grand-père une quelconque personne, vaguement découverte au coin d'internet que ce que vous aimeriez que je vous attribue comme père n'importe quel quidam portant un nom et un prénom identique à ce dernier !