Une interrogation m'a interpellée récemment : "Mais que dois-je mettre dans mon arbre ?"
J'ai trouvé la question finalement bien pertinente tant la façon de se jeter dans la généalogie au titre de la passion se reflète par là-même. Mes réflexions à ce sujet ont bien vite rejoint les problématiques d'apprentissage que je pose déjà depuis quelques temps. Le seul terme qui me gêne dans le questionnement est le mot arbre, car s'il s'agit de la représentation graphique d'une généalogie, nous allons être limités par la matérialité de la chose : un arbre dessiné sur une feuille A0 pourra contenir plus d'informations que sur une feuille A4. J'aurai toutefois tendance à être enclin de positionner le plus correctement possible le nom, bien visible, le maximum de prénoms, les dates et lieux de naissance, mariage et décès, la profession. La consultation permettra de se repérer assez facilement et, éventuellement, se référer à une autre structure pour compléter ses informations : un autre arbre, un livre, un panneau d'affichage, un ordinateur etc... Bien entendu, dans ce genre de configuration, plus on souhaite placer d'individus (enfants, collatéraux, époux successifs ...) plus la représentation sera confuse et il sera bon de se limiter dans le temps ou dans les différentes branches. Pour ces conceptions "papier", je favoriserai la multiplication des arbres plutôt qu'un seul de 5m de long. Si l'arbre est représenté grâce à un logiciel de généalogie le problème, quoiqu'un peu similaire, est simplifié par la circulation de branches en branches proposée par les principaux programmes du marché.
L'arbre peut devenir l'outil principal de conduite, le panneau de contrôle. Le terme "arbre" peut également se comprendre comme la désignation de l'ensemble des recherches : "Mais que dois-je mettre dans ma généalogie ?". Effectivement j'entends souvent le terme "arbre" désignant tous les travaux d'une personne : "J'ai fait mon arbre", "Ton arbre remonte jusqu'où ?", "Est-ce que tu as un notaire dans ton arbre ?" etc. La réflexion est donc posée et mon approche est différente en fonction du degré d'expérience généalogique. En effet, on aurait tendance à dire "Mettez tout ce que vous avez dans votre arbre". La démarche étant de pouvoir trier par la suite, extraire les informations nécessaires, faire des recoupements etc ... C'est vrai et correct pour tout généalogiste qui se respecte. Même Jules MARTIN, garde-champêtre, âgé de 45 ans, non parent du défunt et qui signe au bas de l'acte de décès peut être intéressant. J'avoue bien volontiers ne pas prendre en compte ce genre d'information dans mes généalogies, tant pis si un jour je m'en mords les doigts ! Je note par contre scrupuleusement tout le reste, contenu du document, source, échange, transcription, conditions d'obtention s'il y a lieu. Mais cette tendance à tout noter, à tout inclure dans sa généalogie peut être néfaste pour un débutant.
En général le novice n'a qu'une seule hâte : remonter le plus loin possible et retrouver le plus d'ancêtres. Cette "précipitation" ne l'incite pas à noter les événements annexes une fois la découverte d'un ancêtre faite, c'est une perte de temps. Il est fort difficile de faire comprendre l'intérêt de tout noter et, de plus, lorsque ce dernier note tout, il se noie dans l'ensemble des documents, des propositions, s'éloigne de sa véritable quête (qu'il ne se fixe pas toujours d'ailleurs). C'est pour cela que je conseille, surtout sur les trois ou quatre premières générations de ne pas tout noter, mais de prendre plaisir à retrouver tout le monde.
Donnons-nous, par exemple, comme but, de retrouver tous les ancêtres directs, père et mère, sur trois générations au-dessus de celle de la personne recherchée et d'en fournir les dates de naissance, de mariage et de décès. Si en cours de route vous dénichez des pièces intéressantes et différentes de celles recherchées, surtout ne les regardez pas ! Rangez-les précieusement, mais n'y prêtez pas attention ! Par contre veillez à bien récupérer les documents prouvant les différents liens pour les trois générations.
Une fois l'exercice fini, on sera déjà un chercheur dégrossi, on pourra alors se donner une autre quête : passer à la génération suivante, retrouver tous les enfants de chacun des couples, faire le parcours militaire de chacun des hommes etc. La technique sera la même que précédemment, peut-être se réfèrera-t-on à des documents placés de côté et l'on en mettra de nouveau certains autres, ainsi de suite. Au bout de plusieurs de ces quêtes, les plus petites seront les plus faciles à réaliser, l'arbre s'étoffera et son contenu impressionnera certainement vos futurs interlocuteurs. Contenu qui pourra, d'ailleurs, pour rappel, être autre chose qu'un arbre : un livre, une affiche, une exposition, une conférence ...
Je l'avais déjà dit, je le répète, au même titre que pour de multiples activités, la généalogie doit obéir à la règle de la définition du but recherché. Sans but l'errance est totale, l'avenir incertain et le chemin tortueux. Même si votre but est de prouver que vous descendez bien d'Adam et Ève, il est défini, à vous de le démontrer. Sachez toutefois adapter votre quête et ne vous lancez pas dans des défis pour lesquels vous n'avez pas les éléments nécessaires. Progressez et soyez patients ; sauf accidents, la plupart des documents existeront toujours, certains se découvriront même au fur et à mesure. Ne cédez donc pas aux sirènes vous appelant à vous détourner de votre mission, vous y prendriez peut-être du bon temps mais vous constateriez rapidement que cela ne vous aura en rien aidé.
Je répondrai donc à la question : "Mais que dois-je mettre dans mon arbre ?" à la manière Jésuite : "Mais à quoi voulez-vous que ressemble votre arbre ?"
Rappelez-vous les fêtes de Noël et les arbres vus chez vos proches, vos voisins, vos amis. Certains sont surchargés de tout un tas de décorations, d'autres fort sobres, et d'autres encore répondent à un agencement rigoureusement identique d'années en années. Ce sont pourant tous des arbres de Noël !