On lit dans La Gazette des Tribunaux: La police se livre, depuis deux ou trois jours, à des recherches multipliées pour arriver à la découverte de l'auteur d'un rapt qui a beaucoup d'analogie avec celui qui a été commis il y a quelques années sur l'enfant d'un honorable magistrat du tribunal de première instance de la Seine. Voici dans quelles circonstances ce dernier enlèvement s'est accompli: Les époux MALESSET, menuisier, boulevard des Fourneaux, 33, avaient deux enfants, deux petits garçons, l'un de trois à quatre ans, l'autre de dix-sept mois.
Ces enfants, pendant le jour, jouaient ensemble tantôt dans l'atelier au rez-de-chaussée, tantôt sur le boulevard devant la maison, et dans ce dernier cas, lorsque le bruit lointain d'une voiture se faisait entendre, le père ou la mère veillaient toujours sur eux. Mardi dernier dans la journée, les deux enfants étaient sortis sur le boulevard et s'étaient aussitôt livrés à leurs jeux devant la maison, ne s'en écartant qu'à une faible distance, de manière que leurs cris de joie pouvaient toujours être entendus de leurs parents.
A un moment donné, ces derniers ne les entendant plus depuis quelques minutes, sortirent et ne les virent plus sur le boulevard. Ils les cherchèrent aussitôt dans les maisons voisines, mais inutilement, et enfin ils finirent par apprendre qu'on avait vu leurs deux enfants en compagnie d'une femme de quarante-cinq ans à cinquante ans qui les conduisait dans la direction de l'ancienne barrière du Maine. On avait pensé que cette femme était leur parente ou leur amie, et l'on ne s'en était pas autrement inquiété. Cette révélation inspira à la dame MALESSET de sinistres soupçons, mais surmontant son émotion, elle s'engagea immédiatement dans la direction indiquée. A peine avait-elle fait quelques pas qu'elle vit accourir devant elle et seul l'aîné de ses enfants.
Celui-ci raconta qu'étant à jouer à l'extrémité de la maison, sur le boulevard, la femme signalée les avait abordés et les avait engagés à aller avec elle, en leur offrant des bonbons; qu'elle les avait pris par la main et les avait conduits du côté de la chaussée du Maine, où stationnait une voiture dans laquelle elle était montée avec son petit frère, et qu'après l'avoir renvoyé, lui, à la maison, elle avait fait partir la voiture au grand trot. Il n'avait pas tardé à perdre de vue la voiture, et il était revenu en courant.
On a pu s'assurer que les choses s'étaient, en effet, passées de cette manière, mais il n'a pas été possible, en ce moment, de savoir quelle était cette femme ni quelle direction elle avait prise, et la dame MALESSET n'a pu que se résigner à dénoncer ce rapt au commissaire de police des quartiers Saint-Lambert et Necker, qui en a dressé immédiatement procès-verbal.
La femme signalée paraissait, ainsi que nous l'avons dit, âgée de quarante-cinq à cinquante ans; elle est petite de taille, brune, maigre, visage frais et coloré, vêtue d'une robe noire, d'un talma de même couleur, et coiffée d'un bonnet blanc en lingerie.
L'enfant enlevé, nommé Léon Victor MALESSET, âgé de dix-sept mois, très fort pour son âge, a les cheveux blonds légèrement bouclés; les yeux bruns, le front très découvert, le nez droit, large du bas, la bouche moyenne, quatre dents à chaque mâchoire sur le devant, le teint assez coloré. Il était vêtu au moment du rapt, d'une blouse bleue de laine à carreaux blancs plissée jusqu'à la taille, d'un tablier en indienne à fond blanc, de brassières en indienne avec manches longues et d'une chemise de coton; il était chaussé de bas rayés, de brodequins, et coiffé d'un bonnet en indienne fond blanc.
La publicité de ce double signalement pourra sans doute faire découvrir la femme qui a commis le rapt et le jeune enfant qui en est victime.
Léonard Victor MALESSET est né à Paris, 33 rue des Fourneaux, le 18 avril 1862, fils de Justin Vincent, menuisier, âgé de 43 ans, et de Rose TUBOEUF, blanchisseuse, âgée de 32 ans.
Justin Vincent MALESSET, menuisier, né à Orsennes (Indre) , le 9 août 1819, demeurant à Montcocu, commune de Baraize (Indre), fils de Sylvain, décédé à Orsennes le 25 janvier 1825, et de Madeleine NANDILLON, s'est marié à Baraize, le 17 janvier 1847, avec Rose TUBOEUF, née à Baraize le 12 février 1830, fille de François Jean, charpentier, et de Anne SIGURETTE, domiciliés à Montcocu.