Il y a trois jours, vers neuf heures, les ouvriers de la fonderie de fer de Navarre (Eure) étaient réunis avec leurs familles dans le pré du Bel-Ebat pour fêter la Saint-Eloi et se livraient au plaisir de la danse. Plusieurs d'entre eux voulurent, malgré la défense expresse qui leur en avait été faite par le chef de l'établissement, tirer une salve d'artillerie avec un petit canon en fer fondu dans l'usine. Parmi ces imprudents se trouvait le nommé CRAVILLY, âgé de trente-quatre ans, ancien soldat au 2e régiment de zouaves, qui a fait la campagne de Crimée, a été blessé à la prise de Sébastopol et est décoré de la médaille militaire. Il se chargea du service de la pièce, fatale pensée qui devait, hélas! lui coûter bien cher.
Deux coups avaient été tirés déjà. Au moment où il chargeait le troisième, le canon suréchauffé est parti seul, et le malheureux CRAVILLY a été renversé par le coup dans un état déplorable. Le poignet droit avait été enlevé et on n'a pu en retrouver que des lambeaux ; deux doigts de la main gauche étaient déchiquetés ; le bras du même côté était brisé en plusieurs endroits. Le malheureux avait, en outre, à la partie antérieure de l'estomac, une plaie pénétrante qu'on suppose faite par une pierre qui se sera trouvée dans l'herbe avec laquelle CRAVILLY bourrait le canon. Enfin, la figure était criblée de poudre, et un œil était presque perdu.
CRAVILLY a été transporté à l'hospice, et ce matin on a dû faire l'amputation des deux bras. Doué d'une énergie peu commune, il a subi avec un courage héroïque cette double amputation. Il ne s'est préoccupé que de sa pauvre femme et de ses enfants, disant que, quant à lui, il n'avait que la punition de sa témérité et de sa désobéissance. Son état est très grave et inspire les plus sérieuses inquiétudes.
A la première nouvelle de cet accident, M. le préfet s'est transporté auprès du blessé, et, après avoir veillé à ce qu'il reçût tous les soins désirables, a accordé un secours de 500 fr. à la famille.
Denis CRAVILLY, ouvrier de fonderie, militaire pensionné, domicilié à Evreux (Eure), né à Breteuil-sur-Iton (Eure), le 9 octobre 1828, fils de Charles Félix, charpentier, et de Rose Julie GROUARD, domiciliés à Breteuil, époux d'Eugénie TALLIS, est décédé à Evreux, le 2 juillet 1863.
Charles Félix CRAVILLY, ouvrier charpentier, domicilié à Bourth (Eure), né à La Bonneville-sur-Iton (Eure), le 17 floréal de l'an 9, fils de Pierre, décédé à Bourth, le 5 mars 1821, et de Marie BOLOGNE, s'est marié le 14 juin 1825, avec Rose Julie GROUARD, domicilié à Breteuil-sur-Iton, née à La Ferrière-sur-Risle (Eure), le 18 brumaire de l'an 11, fille de Pierre Charles, menuisier, et de Marie Catherine DAVID, domiciliés à Breteuil-sur-Iton.
Pierre CRAVILLY, journalier, domicilié à La Bonneville-sur-Iton, où il est né le 30 mars 1769, fils de Pierre, journalier, et de Françoise THOMAS, s'est marié à La Bonneville-sur-Iton, le 9 avril 1793 (9 avril an 2), avec Marie BOLOGNE, enfant trouvée du bureau de Paris, née le 18 mars 1768, domiciliée à La Bonneville-sur-Iton.