soudain s’apercevoir que c’était le passé
et maudire ce qui fut
comme un roc qui refuse de périr sous les coups du temps
se laisser droguer par une gentiane
et l’écouter parler de ses bonheurs
un gage que je me donne
pour en acquérir les pigmentations
en déchiffrer les significations
sur une mer déchaînée
se fracassent par dizaines les esprits
soudain s’apercevoir que c’était le passé
et que nous nous lamentions
nous pleurerons encore sur ce sort
puisqu’il faut que nous pleurions
qui est-il ?
un jour un mage a fait renaître l’aimé grâce à une larme
et depuis l’on croit
peut-être l’esprit pur redécouvrira-t-il ce secret
et voguera l’âme sur nos coeurs
je découvre une faille
je pressens une erreur
et abjure les sens
qui est-il ?
et je m’aperçois en suivant ce triste cortège
escortant une vieille dame morte dans sa quatre-vingt-seizième année
et que tout le monde regrette
même ceux qui ne l’ont pas connu
même ceux qui lui ont craché dessus
même ceux qui n’espèrent pas vivre comme elle
même ceux qui croient au paradis extra-terrestre
que les habitudes se transmettent sans intermédiaires
et sur ce cercueil qui oscille
pareil à une feuille bercée par le vent
qui ne sait toujours pas où diriger sa chute
je sens une présence qui dit
soyez heureux
et laissez-moi en paix
laissez-moi
gardez vos larmes pour les vivants